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 Sérums antivenimeux et immunothérapie

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benji63
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MessageSujet: Sérums antivenimeux et immunothérapie    Sérums antivenimeux et immunothérapie  Icon_minitimeDim 13 Nov - 16:21

Les venins de serpent : composition et toxicité

Les envenimations ophidiennes constituent un véritable problème de santé publique dans le monde, tout particulièrement dans les pays tropicaux et subtropicaux, où l’incidence de la morbidité et de la mortalité associées aux morsures demeure élevée. Les données épidémiologiques, bien que fragmentaires, permettent d’estimer à plus de 5 millions le nombre de cas d'envenimations par an avec un taux de mortalité de 2,5 % (Chippaux, 1998). Les continents les plus touchés sont par ordre décroissant l’Asie (4 millions de cas), l’Afrique (1 million) et les Amériques (350000). La gravité d’une envenimation va dépendre de plusieurs facteurs :

le type d’appareil d’injection. Les serpents Vipéridés ont l’appareil d’injection le plus performant, permettant d’injecter le venin sous pression en infligeant une piqûre plutôt qu’une morsure.

la toxicité intrinsèque du venin, qui peut être estimée d’après la valeur de sa toxicité aiguë chez l’animal (DL50 ou dose qui tue 50% des animaux),
la quantité de venin injecté qui dépend de la taille du serpent et de l’état de réplétion des glandes,
le lieu d’injection,
l’âge et l’état de santé de la victime.

Composition

Les venins de serpent sont des mélanges complexes de protéines sécrétées par des glandes venimeuses qui dérivent de glandes salivaires labiales. Leur fonction première est de participer à l’immobilisation et/ou à la digestion de la proie. On peut distinguer deux types de composants dans les venins de serpent, les enzymes et les toxines. On trouve également des protéines douées d’activité pharmacologique et qui ne sont ni des enzymes, ni des toxines.

Les enzymes

Les enzymes de nature variées sont très nombreuses dans les venins de serpent. Parmi la trentaine d’activités enzymatiques détectées, la moitié d’entre elles est retrouvée dans tous les venins. Certaines enzymes peuvent exercer un effet toxique local : œdème, suffusions hémorragiques, nécroses. Parmi les enzymes retrouvées dans tous les venins, on distingue :

les hyaluronidases qui, en hydrolysant les liaisons glycosidiques de certains mucopolysaccharides du tissu conjonctif, facilitent la diffusion des autres composants toxiques du venin.

les protéases, endopeptidases et exopeptidases, dont l’action est souvent peu spécifique.

les phospholipases A2 qui hydrolysent les glycérophospholipides et la lécithine des membranes cellulaires et sont ainsi responsables de la lyse des globules rouges, lyse que l’on ne retrouve que rarement dans les envenimations humaines.

On trouve également des acétylcholinestérases, des amino-acide-oxydases, des phosphoestérases, des hydrolases, des nucléosidases, des ribonucléases.

Les enzymes agissant sur les facteurs de la coagulation sanguine et l'endothélium vasculaire ont une importance particulière. Ce sont pour la plupart des protéases à action procoagulante ou anticoagulante. Elles provoquent une incoagulabilité sanguine et sont présentes et actives surtout dans les venins de Viperidés. On peut citer :

les composants agissant sur les parois vasculaires ou hémorragines. Ces métalloprotéases Zinc-dépendantes hydrolysent certains éléments de la paroi vasculaire, entraînant des hémorragies locales spontanées, en nappe, persistantes si le sang est par ailleurs incoagulable ;
les composants agissant sur les cellules endothéliales des parois vasculaires qui provoquent la libération de certains effecteurs, prostaglandines ou activateurs de plasminogène.
les activateurs de la protéine C ;
les composants agissant sur l’activation de la prothrombine ou des facteurs V, VIII, X, XIII ;
les composants agissant sur le fibrinogène ;
les enzymes lysant la fibrine ;
les facteurs agissant sur les plaquettes (activateurs ou inhibiteurs de l’agrégation plaquettaire…).

Les toxines

Les effets toxiques des venins de serpent sont le résultat de l’action conjuguée des toxines qui les composent. Les toxines sont des polypeptides ou des protéines regroupées en plusieurs catégories selon leur constitution chimique ou leur action pharmacologique. Certaines sont communes à plusieurs espèces ou à plusieurs familles de serpents venimeux, sans toutefois être identiques, d’autres sont plus ou moins spécifiques d’une espèce particulière. Les toxines du système neuro-musculaire comprennent :


les neurotoxines curarisantes (neurotoxines), dites toxines à trois doigts qui se fixent sélectivement sur les récepteurs post-synaptiques de l’acétylcholine. Elles sont caractéristiques des venins d’Elapidés et d’Hydrophidés. les neurotoxines présynaptiques (neurotoxines) constituées d’une à cinq chaînes polypeptidiques dont l’une au moins est une phospholipase A2. Ces toxines inhibent la libération d’acétylcholine.
les cardiotoxines, présentes dans les venins de cobras, qui ont une structure à trois doigts comparable à celle des neurotoxines. Ces toxines induisent des nécroses cutanées.
des toxines que l’on ne retrouve que dans certains genres, telles les sarafotoxines, molécules vaso-constrictrices des venins du genre Atractaspis, les dendrotoxines et fasciculines des venin de Dendroaspis, qui respectivement augmentent la libération d’acetylcholine et inhibent son métabolisme et enfin les myotoxines, petits polypeptides basiques des venins du genre Crotalus ou phospholipases A2 des venins de Vipéridés ou d’Elapidés.


Autres composants


Certains composants agissent sur certains mécanismes biologiques sans pour cela exercer une toxicité chez l’animal. On peut citer le facteur de stimulation de la croissance du nerf qui induit et accélère la différenciation des neurones sensoriels des ganglions sympathiques (Cohen et Levi-Montalcini, 1956), la convulxine, glycoprotéine capable d’activer les plaquettes sanguines (Marlas et coll., 1983, Francischetti et coll., 1997), la bothrojaracine, inhibiteur spécifique et puissant de la thrombine (Zingali et coll., 1993) et le TSV-PA, un activateur du plasminogène (Zang et coll., 1995).

Toxicité

A part quelques rares exemples, où la toxicité du venin peut être attribuée à une toxine, les venins de serpent comportent généralement plusieurs protéines toxiques qui peuvent agir en synergie et qui sont à l'origine de la toxicité globale du venin. La toxicité des venins de serpent est déterminée au moyen d'expériences réalisées in vivo chez l'animal. Ces mesures permettent d'obtenir une appréciation globale de la toxicité d'un venin brut, résultante de l'ensemble des activités de ses différents constituants. Les animaux utilisés au cours de cette étude sont principalement des souris, des rats ou des lapins. La voie d'administration de la toxine est variable (sous-cutanée, intradermique, intramusculaire, intrapéritonéale, intraveineuse ou intracisternale). Cependant, la voie intraveineuse caudale donne les résultats les plus homogènes et doit être retenue dans les mesures standardisées. En général, elle fournit aussi les valeurs toxiques les plus élevées c’est à dire les DL50 les plus faibles. Les conditions opératoires doivent être codifiées de façon stricte afin d’obtenir des données reproductibles et comparables (poids et âge identique, même souche d’animal testée, voie d’injection unique pour tous les animaux, injection lente, durée d’observation de 48 heures). Différentes méthodes statistiques permettent la détermination d’un intervalle de confiance (Reed et Muench (1938), Litchfield et Wilcoxon (1949), Spearman et Kärber (OMS, 1981)).

Du fait de la grande variété des effets pharmacologiques induits par les venins de serpents, l'OMS préconise de plus des déterminations in vivo de leur toxicité (activité défibrinisante, activité nécrosante, activité hémorragique ).

Plusieurs auteurs ont décrit l'existence d'une variation dans la symptomatologie de l'envenimation par des serpents appartenant à la même espèce (Chippaux et coll., 1991a). Ces variations intraspécifiques sont en général liées à la localisation géographique des individus (Jimenez Poras, 1964 ; Rael et coll., 1985). Cette variabilité d’origine génétique (Nkinin et coll., 1996b) mais dont l’expressivité serait liée au régime alimentaire (Daltry et coll., 1996) est à prendre en compte lors du processus d’immunisation de l’animal qui fournira le sérum antivenimeux. De nombreuses études ont montré que la toxicité du venin diminue avec l'âge du serpent alors que l'activité protéolytique augmente (Minton, 1967 ; Lomonte et coll., 1983 ; Mackessi, 1988). Cette observation peut être expliquée par le fait qu'un individu jeune, donc de petite taille, nécessite un venin puissant pour immobiliser sa proie alors qu'un adulte s'attaque plus volontiers à des proies de grande taille et nécessite de ce fait un venin dont l'activité protéolytique est plus élevée.


Fabrication des sérums antivenimeux et standardisation

Fabrication

Compte tenu de l’existence d’une variabilité génétique de la composition des venins de serpent de même espèce, il est nécessaire d’effectuer des immunisations en utilisant un mélange de venin provenant d’individus de localisation géographique variable. Le venin est obtenu soit par pression mécanique de la glande venimeuse ou par stimulation électrique des muscles striés entourant la glande.

Les sérums antivenimeux sont obtenus par l'hyperimmunisation graduelle d'animaux (chevaux, chèvre, mouton) avec un ou plusieurs venins médicalement importants provenant d'un pays ou d'une région géographique spécifique. Si un seul venin est utilisé pour l'immunisation, le sérum antivenimeux est dit monovalent, lorsque plusieurs venins sont utilisés, il est dit polyvalent. Du fait de la complexité de la composition des venins, un sérum polyvalent possède un pouvoir de neutralisation plus faible qu'un sérum monovalent dont on peut notablement diminuer la dose administrée, ce qui réduit le risque de réactions secondaires. Généralement, les cliniciens préfèrent utiliser des sérums polyvalents, d'une part car les symptômes cliniques sont rarement révélateurs d'une espèce et que d'autre part, la discussion concernant le choix d'un sérum antivenimeux monovalent peut retarder le traitement.

L'immunisation de l'animal au moyen d'un venin non modifié permet d'obtenir des sérums plus efficaces car les venins désactivés sont généralement immunologiquement moins actifs. Cependant, certains venins très toxiques nécessitent la préparation d'un toxoïde obtenu par complexation du venin avec la formaline ou avec d'autres aldéhydes tels que le glutaraldéhyde. Il est également possible de détoxifier le venin par action de radiations ionisantes. Le venin, détoxifié ou non, est ensuite associé à un adjuvant (adjuvant de Freund, bentonite, gel d'hydroxyde d'aluminium, alginate de sodium) qui a pour effet d'une part de diminuer la toxicité du venin en limitant la diffusion de celui-ci à partir du point d'injection et d'autre part qui permet une stimulation intense du système immunitaire. Le protocole d'immunisation dépend de la toxicité et de l'immunogénicité du venin, de l'espèce animale utilisée pour l'immunisation, de la réponse de l'animal et de son état de santé. L'étape d'hyperimmunisation est très délicate à réaliser, car elle nécessite un ajustement permanent entre la quantité de venin injectée et le niveau d'anticorps produits par l'animal (10 à 50 injections durant une période de 15 mois peuvent être nécessaires pour obtenir une bonne immunisation de l'animal). Les animaux reçoivent en moyenne 2 à 3 injections de rappel par mois, à une semaine d'intervalle et leur sang est prélevé quelques jours après chaque injection.

Les sérums d’animaux hyperimmunisés ne sont plus utilisés à l’état brut. Des améliorations successives ont été apportées à la préparation des sérums antivenimeux pour obtenir une plus grande efficacité et une meilleure tolérance. Les immunoglobulines sont traitées par protéolyse ménagée. L'immunoglobuline G (IgG) est une protéine volumineuse de masse molaire égale à environ 150 kDa, qui se compose de deux fragments Fab thermostables porteurs de la spécificité immunologique (Fab = fragment antigen binding) et d'un fragment Fc thermolabile réagissant avec le complément. Une digestion par la pepsine libère le fragment F(ab’)2, de masse molaire moyenne de 90 kDa et porteurs de deux sites de fixation de l'antigène, comme l'immunoglobuline native. Un traitement par la papaïne sépare le fragment Fc des fragments Fab individualisés, de masse molaire moyenne de 50 kDa et porteurs, chacun, d'une seule valence de fixation de l'antigène : ces caractéristiques confèrent aux fragments Fab des propriétés biologiques différentes, par rapport à l'anticorps d'origine ou au fragment F(ab’)2. Les sérums antivenimeux actuels sont généralement des F(ab’)2. En pratique, le protocole de purification peut être ainsi schématisé :

Digestion du plasma ou du sérum par la pepsine à pH acide.
Précipitation par le sulfate d'ammonium à 15 ou 20%.
Coagulation des Fc par la chaleur (F(ab')2 thermostables) et décomplémentation (57-58°C).
Refroidissement rapide à 40°.
Élimination des protéines dénaturées par centrifugation ou filtration.
Précipitation sélective des immunoglobulines par le sulfate d'ammonium à 55% de saturation.
Élimination du sulfate d’ammonium par dialyse.
Élimination des lipides par adsorption sur hydroxyde d'aluminium.

Le produit obtenu subit alors divers contrôles avant le conditionnement final :

contrôles bactériologiques par ensemencement de milieux de culture appropriés
contrôles toxicologiques par inoculation chez l'animal pour vérifier l'absencede pyrogène
contrôles immunologiques pour mesurer l'efficacité protectrice.

La composition en anticorps d'un sérum antivenimeux peut être vérifiée en effectuant un Western blot, après migration électrophorétique du venin. Le sérum doit réagir avec toutes les bandes protéiques du venin séparées selon leur poids moléculaire.
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MessageSujet: Re: Sérums antivenimeux et immunothérapie    Sérums antivenimeux et immunothérapie  Icon_minitimeDim 13 Nov - 16:33

Mise en oeuvre et indications
Mise en œuvre

Le SAV représente la seule médication spécifique capable de neutraliser directement l'action des toxines présentes dans les venins : le principe de son utilisation n'est guère contestable, et un récent colloque sur le traitement des envenimations a dégagé un consensus sur cette prise de position (Bon et Goyffon, 1996). En revanche, l'optimisation de son utilisation offre matière à discussion : des problèmes subsistent, tels que le choix du SAV lorsque plusieurs présentations sont disponibles, le délai au-delà duquel la sérothérapie peut paraître inappropriée, la voie d'administration, l'existence éventuelle de contre-indications, la possibilité de réactions adverses qu'il faudra s'attacher à prévenir (Chippaux et Goyffon, 1991b).

Indications

La décision d'utiliser un SAV prendra en compte les circonstances de la morsure, le délai écoulé après la morsure, la symptomatologie, l'environnement médical, en particulier l'accessibilité à une unité de soins intensifs. En Europe, le SAV s'impose chez l'enfant lorsque l'envenimation est certaine et chez l'adulte lorsqu'elle est sévère ou accompagnée de signes hématologiques. Dans les régions tropicales, l'indication sera plus large, notamment chez l'enfant et la femme enceinte. Les éleveurs de serpents représentent un cas particulier: ils connaissent bien leurs animaux, et l'identification du serpent est assurée; mais d'autre part, ils sont mordus par surprise, par un animal en phase particulière d'agressivité, en sorte que les morsures sont potentiellement graves. En outre, certains d'entre eux sont des polymordus (morsures dites "illégitimes") et sont ainsi exposés à des réactions de sensibilisation, au venin ou au SAV (Goyffon et Chippaux, 1984). Sauf contre-indication avérée, la sérothérapie sera systématique en cas de morsure illégitime, consécutive à la manipulation d'un serpent venimeux.

Les signes physiques, en particulier l'œdème après morsure de vipère ou de crotale, surviennent progressivement au cours de la première heure de l'envenimation (Blaylock, 1983; Reid et Theakston, 1984; Goyffon et Chippaux, 1990), et leur précocité est en général signe de gravité. Il faut savoir les rechercher: ils permettent le choix du SAV et déterminent la posologie (Chippaux et Goyffon, 1991a). Le SAV apparaît maintenant, pour beaucoup, un traitement global de l'envenimation et non plus seulement comme un antidote des effets létaux du venin : Homma et Tu (1970), Russell (1980), Reid (1980), Gutierrez et al. (1981), Garfin et al. (1985) ont montré l'effet protecteur du SAV sur le développement des complications locales. Thomas et al. (1995) ont mis en évidence l'effet bénéfique préventif des thromboses par le SAV dans l'envenimation par Bothrops lanceolatus. Stahel et al. (1985) ainsi que Thomas et al. (1996b) ont observé une réduction du temps d'hospitalisation chez les sujets soumis à une sérothérapie. Cette conception conduit à élargir les indications du SAV, et modifie les conditions d'utilisation sur deux points importants, la voie d'administration et la posologie.

En zone tropicale (Chippaux et Bessy, 1980) comme en France (Sorkine et Bon, 1995; Sorkine et al., 1996), il apparaît qu'un nombre élevé de morsures, 30 à 50%, ne sont pas suivies de signes d'envenimation (morsures dites "sèches", ou "blanches"). Si après une mise en observation de trois heures, aucune manifestation clinique n'apparaît, la sérothérapie n'a pas d'indication véritable (Chippaux et Goyffon, 1991b). Les échelles ou scores de gravité établies par différents auteurs visent à préciser et à faciliter l'indication d'une sérothérapie (Audebert et al., 1994a; Thomas et al., 1995; Dart et al., 1997)

Le choix du SAV est fonction des stocks disponibles et du tableau clinique. Un SAV monovalent est préférable lorsque le serpent est identifié, mais n'est pas toujours accessible. Le SAV polyvalent sera utilisé dans les autres circonstances, serpent non identifié ou seule présentation disponible. Le SAV polyvalent offre en général une meilleure paraspécificité que le SAV monovalent, et sera plus facilement utilisé à ce titre, lorsque l'envenimation est due à une espèce proche de celle qui a servi à préparer le SAV.

Administration

Les principaux problèmes soulevés se rapportent au délai, à la voie d'administration et à la posologie (Chippaux, 1996).

le délai : il est admis que l'immunothérapie, une fois son indication posée, est d'autant plus efficace qu'elle est précoce. Cependant, un long délai entre la morsure et la mise en route du traitement ne doit pas conduire à l'exclure. On a vu que dans certains cas, les anticorps antitoxines sont susceptibles de déstabiliser la liaison toxine-récepteur cellulaire (Boulain et Ménez, 1982). Dans d'autres cas, les signes cliniques n'apparaissent eux-mêmes qu'assez tardivement, comme les hémorragies consécutives aux morsures d'Echis ocellatus (= carinatus), dues à une action prothrombinique et défibrinante du venin puissante mais lente à se manifester. Des guérisons sans séquelles de patients envenimés par des vipéridés et traités avec retard ont été rapportées (Chapman, 1968; Russell, 1980; Reid et Theakston, 1984). Il n'est pas possible de fixer une limite de temps au-delà de laquelle la sérothérapie n'est plus active sur l'envenimation, mais la posologie doit tenir compte du retard dans sa mise en œuvre et être adaptée en fonction de l'état clinique (Chippaux, 1996).
la voie d'administration : compte tenu d'une diffusion potentiellement plus rapide des toxines dont la masse molaire est généralement inférieure à celle des anticorps neutralisants, la voie veineuse est actuellement recommandée par la plupart des auteurs. Le plus souvent, le SAV est administré en perfusion lente, dilué au dixième ou au cinquième dans une solution isotonique (Russell, 1980; Reid et Theakston, 1984). L'injection directe, lente, permet de réduire de plus de moitié les quantités injectées (Sreeharan et Ganeshamoorthy, 1985). La voie veineuse a pour autre avantage de permettre de mieux contrôler l'apparition d'effets secondaires immédiats ou précoces (Warrell et al., 1986). A défaut de la voie veineuse, on pourra avoir recours à la voie intramusculaire, moins efficace et qui n'évite pas les effets secondaires (Doucet, 1975). De plus, en cas de réaction d'intolérance, le SAV continue à être résorbé, alors qu'on peut stopper immédiatement une administration par voie intraveineuse, quelles qu'en soient les modalités. L'injection par voie sous-cutanée autour du site de morsure est à proscrire: elle est douloureuse, inefficace, et bien souvent le site de morsure ne se prête pas à une telle injection sauf à induire des complications locales (Chippaux, 1982). En France, les SAV disponibles n'ont l'AMM (autorisation de mise sur le marché) que pour une administration par voie intramusculaire ou sous-cutanée, ce qu'on peut regretter. Ils sont en passe de l'obtenir pour la voie veineuse ou l'ont déjà eue.
la posologie : elle est fondée sur l'évolution clinique, le délai de mise en route de la sérothérapie, la diagnose du serpent responsable de l'envenimation, le titre du SAV, l'environnement médical. Faute de disposer de manière courante de l'évaluation de la quantité de venin circulante ("veninémie"), on cherchera à se situer en excès d'anticorps pour éliminer toute toxine libre. Les échelles de gravité clinique pourront servir non seulement à poser l'indication d'une sérothérapie, mais aussi à en adapter au mieux la posologie (Bucher et al., 1996). Des doses de 100 à 150 ml administrées en une journée ont été préconisées (Reid et Theakston, 1984). On s'oriente actuellement vers des posologies plus modestes (Chippaux, 1992; Bon et Goyffon, 1996). Les doses initiales seront de l'ordre de 20 à 60 ml par jour, selon la gravité du tableau clinique, à renouveler le ou les jours suivants en fonction de l'état du malade. Les morsures par Echis sp. qui sont suivies d'un état d'incoagulabilité prolongée en l'absence de thérapeutique spécifique, imposeront la sérothérapie tant que le bilan de coagulation restera perturbé. De toute façon, la posologie doit être adaptée à la quantité de venin inoculée, évaluée biologiquement (Theakston et Reid, 1979; Khin-Ohn-Lwin et al., 1984; Sjostrom et al., 1996) ou cliniquement (Rousselot et al., 1991; Chippaux, 1992; Barrau et al., 1995; Thomas et al., 1996b; Sorkine et al., 1996), ou encore à la capacité moyenne glandulaire du serpent, et non au poids corporel du sujet envenimé (Winson, 1976; Chippaux, 1992)

Effets secondaires

Les réactions secondaires observées au cours de l’immunothérapie sont dues à l'administration de protéines étrangères (hypersensibilité de type I), à la sensibilisation préalable du patient au sérum de cheval (d'hypersensibilité de type III ou IV selon le délai d’apparition) ou à la présence de complexes immuns difficilement éliminés par l'organisme. Ces réactions sont en général bénignes, surtout les réactions d'hypersensibilité de type I, mais elles peuvent parfois avoir un caractère brutal (anaphylaxie).

Les réactions précoces apparaissent soit chez des sujets sensibilisés, ayant reçu antérieurement une immunothérapie antivenimeuse ou antitoxinique (sérum antitétanique, par exemple), ou encore chez des sujets vierges de toute immunothérapie antérieure. Dans le premier cas, on parlera de réaction anaphylactique, dans le second de réaction anaphylactoïde (David, 1987). La présence d'une forte proportion de fragments Fc, dépourvus d'activité anticorps mais activant le complément, peut entraîner un choc anaphylactoïde, quand ce dernier n'est pas induit par le venin lui-même (Pugh et coll., 1987)

Les réactions tardives sont plus mal connues que les précédentes. Les anticorps hétérologues du SAV demandent environ trois semaines pour être éliminés de l'organisme qui, pendant ce temps, produit ses propres anticorps dirigés contre l’ensemble des antigènes circulants (venins et anticorps hétérologues). Dans certains cas, des complexes précipitant vont se former rapidement, d'où le nom de "maladie du neuvième jour" donné parfois à cette réaction tardive encore connue sous le nom de maladie sérique ou maladie des complexes immuns (You, 1983). Les complexes précipitant vont se déposer au niveau de l'intima des petits vaisseaux et provoquer une série de symptômes variés habituellement modérés, principalement fièvre, urticaire, adénopathies, arthralgies, néphropathie avec protéinurie. Les formes sévères, une glomérulopathie avec neuropathie, sont exceptionnelles. L'évolution est en règle bénigne, se faisant vers la guérison spontanée en deux à quatre jours. Le traitement est en général inutile. Si les symptômes sont accentués, on peut recourir aux corticoïdes ou aux anti-histaminiques. Cependant ce type d'accident, comme le précédent, constitue une contre-indication à une immunothérapie ultérieure.

L'incidence des réactions secondaires, quelles qu'en soient la nature et l'intensité, est estimée de façon variée et serait inférieure à 5% des personnes traitées par le SAV (Chippaux et Goyffon, 1991). Un récent essai clinique effectué avec un F(ab’)2 administré par voie veineuse a montré que l'incidence des effets secondaires graves était inférieure à 1% (Chippaux et coll., 1997). On considère généralement que la valeur prédictive des tests cutanés ou conjonctivaux n'est pas satisfaisante (Malasit, 1986). Par ailleurs, un test positif ne dispense pas d'une immunothérapie si l'état clinique du malade la justifie. Aussi ces tests tendent-ils à être abandonnés.
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MessageSujet: Re: Sérums antivenimeux et immunothérapie    Sérums antivenimeux et immunothérapie  Icon_minitimeDim 13 Nov - 16:34

Conclusions

Des estimations chiffrent à environ cinq millions le nombre de cas d'envenimations par morsure de serpent dans le monde entraînant de 30 000 à 40 000 décès. Le seul traitement spécifique est l'administration d'anticorps neutralisants le plus souvent présentés sous forme de fragments F(ab')2, plus diffusibles dans l'organisme et mieux tolérés que les immunoglobulines d'origine. L'intérêt des fragments Fab, de masse molaire plus faible, est en cours d'évaluation, en raison de leurs caractéristiques pharmacocinétiques différentes. Compte tenu de la purification des sérums, desquels sont éliminées entre autres protéines indésirables l'albumine et le complément, on ne devrait plus parler de sérothérapie mais d'immunothérapie. Les progrès les plus récents portent sur les possibilités, grâce aux tests ELISA, d'ajuster avec précision les volumes de SAV à administrer. Bien d'autres progrès restent à accomplir, dans le choix des antigènes, dans l'utilisation de fragments d'anticorps neutralisants, dans la connaissance des cinétiques de diffusion des venins et du SAV. En pays tropical, les problèmes liés à la conservation du SAV et au coût de l'immunothérapie ne sont pas résolus.

Les éventuels effets secondaires de l'immunothérapie ne doivent pas inciter à renoncer à cette thérapeutique ni à en retarder la mise en route. La posologie dépend de l'espèce venimeuse en cause, de l'état de la victime et de l'évolution clinique. Des doses élevées peuvent être nécessaires, et le délai séparant la morsure de l'administration du SAV n'est pas un motif d'abstention. La voie veineuse est la plus logique, la plus efficace, la mieux contrôlée. Enfin, une évaluation plus précise des populations à risque conduirait sans doute à rechercher des mesures préventives et, pourquoi pas, à reconsidérer l'intérêt d'une immunoprophylaxie.
intermedianet

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MessageSujet: Re: Sérums antivenimeux et immunothérapie    Sérums antivenimeux et immunothérapie  Icon_minitimeDim 13 Nov - 16:37

Bibliographie

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